SOYONS CONCRETS
LA CHRONIQUE DE CERISE

Du 10 juin
au 2 juillet 2000,
opium
en vente libre

Si vous ne le saviez pas encore, la Belgique et la Hollande ont l'honneur d'accueillir durant ces trois semaines l'Euro 2000.

C'est quoi çà ? Et bien c'est un tournoi de football, entre 16 équipes nationales, dont le pays victorieux sera sacré meilleure équipe nationale européenne pour les quatre années suivantes. Le match au sommet du premier tour de la compétition aura lieu le 17 juin à Charleroi. Cette rencontre verra s'affronter les équipes d'Angleterre et d'Allemagne. Pourquoi, me direz-vous s'agit-il d'un sommet ? Les deux adversaires du jour sont-ils les grands favoris du tournoi ? Non, mais il faut savoir que le combat ne se limite pas au terrain couvert de gazon. Ce match mettra également aux prises les supporters les plus acharnés des deux camps. On craint le pire. Les forces de l'ordre sont sur les dents. Pas question pour un flic hennuyer de solliciter un congé durant cette période. Les casques, les képis seront sur pied de guerre. L'encadrement policier coûtera des dizaines de millions aux citoyens belges. On évalue déjà, à l'avance, les dégâts qui se chiffreront également en millions. Alors pourquoi organiser un événement dont on craint déjà les conséquences ? Il ne faut pas parler d'influence sur le commerce local, certains devront d'ailleurs fermer leurs portes, soit par crainte des dégâts, soit par obligation (interdiction de vendre des boissons alcoolisées). Les bénéficiaires de l'événement seront uniquement les organismes dirigeants du football européen, qui se partageront non seulement les recettes des matches, mais également les droits de retransmission payés par les différentes chaînes de télévision. On est prêt à pleurer lorsqu'un dirigeant de l'Union Européenne de Football Association vous explique son dévouement à son organisation. Il fait appel aux bénévoles, afin de venir en aide à ses dévoués collaborateurs !!! Imaginez le sacrifice du président de l'Union Royale Belge Sportive de Football Association, l'éminent docteur Dhooge, qui se dévoue corps et âme à sa fédération, délaissant sa profession initiale de docteur en médecine. Rassurez-vous, ces postes sont très bien rémunérés. La lutte est aussi serrée pour les occuper, que celle qui a lieu pour un siège de parlementaire. Je n'ai toujours pas répondu à la question concernant le but de l'organisation.

Affaires Dutroux, tueries du Brabant wallon, dossier Pinon, etc. Que de dossiers brûlants à faire oublier au citoyen ! On remarquait, auparavant, que les lois les plus perfides étaient votées durant le Tour de France. Cette dernière compétition ne recueille plus la ferveur d'antan. Il fallait trouver un autre pôle d'attraction, avec l'avantage ...........

que le spectateur doit s'acquitter d'un droit d'entrée, et est concentré dans un stade, semblable à ceux de triste mémoire, d'Amérique du Sud qui, au départ étaient réservés au sport spectacle, et qui finalement ont servi à autre chose. Il peut donc s'agir d'une répétition générale. Grâce à la complicité des médias, le peuple aura son attention branchée sur le football durant un mois. Si Émile Mpenza souffre de la cuisse et Lorenzo Staelens du dos, le supporter s'inquiétera plus que du sort atroce qui a été réservé à Julie et à Melissa. Un penalty est refusé à la Belgique, et on oublie le vacillement de la couronne.

Faut-il condamner le sport ?

Autre interrogation : faut-il condamner le sport en lui-même ? Certainement pas s'il est considéré comme un loisir et une détente. Et le spectacle ? même réponse, il est agréable de pouvoir se rendre dans une salle de théâtre, ou de cinéma, afin de pouvoir tenir son esprit critique en éveil. Ici, il s'agit d'un sport spectacle ! Phénomène qui flatte le nationalisme, le chauvinisme, l'intolérance. Un climat de haine est créé entre supporters. Ceux-ci sont conditionnés par la presse "spécialisée", qui leur raconte de A jusque Z les derniers potins (dixit La Nouvelle Gazette) la vie, la carrière de leurs idoles. C'est cette presse, aidée des commentateurs sportifs des TV et radios qui a créé le phénomène des hooligans.

Incitation à la haine

Thierry Roland, célèbre commentateur de TF1, poursuit une carrière exceptionnelle alors qu'il s'est déjà rendu coupable de nombreux excès verbaux incitant à la vengeance et au racisme. Il est, en effet, curieux de remarquer que ce phénomène de vandalisme et de violence organisés ne se rencontre qu'autour des terrains de football. Il s'agit du sport spectacle le plus médiatisé.

Durant une semaine les "journalistes" sportifs appellent les inconditionnels à soutenir leurs favoris, le dimanche. La moindre information est montée en épingle. La pression est mise, et le lundi, les mêmes personnes dressent le bilan des dégâts. Durant la présentation des équipes, le speaker du stade chauffe les supporters. Ça y est l'ambiance est mise, le hooligan est créé. Il se constitue en meute déchaînée, fier de la crainte qu'il inspire. Il est imprégné de la haine de l'autre, de celui qui est différent, de celui qui a une écharpe d'une autre couleur. Il est prêt à commettre les pires excès, qui seront autant de prétextes à la répression de l'appareil de l'État-pouvoir. Cette répression sera même exercée avec l'assentiment du citoyen moyen, qui veut préserver son confort et sa sécurité.

La médiatisation exceptionnelle de ce sport en a même fait un outil de pouvoir. La Coupe Africaine des Nations qui vient de se dérouler au Nigéria a été le théâtre d'une histoire, qui si elle n'était pas tragique, provoquerait le rire. Les joueurs de l'équipe nationale de la Côte d'Ivoire avaient raté leur qualification pour le stade ultime de la compétition. Comme le nouveau régime souhaitait, ou plutôt exigeait que l'équipe gagne cette compétition, le général Guëi a été invité par le Président à prendre des sanctions à l'encontre des joueurs, qui ne s'étaient pas suffisamment battus. Quoi de plus beau que se battre pour son drapeau ? Le jour de leur élimination, un avion vint les rechercher pour les amener dans un camp militaire situé à Yamoussoukro, en Côte d'Ivoire. Ils y restèrent prisonniers durant trois jours, condamnés à suivre des cours de civisme.

Une marche vers le pouvoir

Combien de politiciens ne se servent-ils pas de leur club local pour asseoir leur popularité. C'est la réussite de l'Excelsior de Mouscron qui permet à son président Jean-Pierre Detremmerie, de conforter ses postes de député et de bourgmestre de la ville. Élio Di Rupo s'était engagé à prendre en mains les destinées du RAEC Mons. Devenu assez puissant, il lâcha son os, sur lequel se jeta Maurice Lafosse, actuel bourgmestre de Mons. Ce dernier employa tous les moyens financiers pour faire de son club un prétendant à l'élite footballistique. Alors que toutes les Communes du pays pouvaient rediscuter leur dette vis-à-vis du Crédit Communal, et demander une baisse des intérêts, seule la ville de Mons s'abstint de cette démarche. En récompense de cette action incivique, le Crédit Communal apporte annuellement un gros pactole dans les caisses du club cher au Bourgmestre. Sa popularité revigorée par les bons résultats lui permet d' encore mettre des bâtons dans les roues de son ennemi intime, pourtant Tout Puissant.

Jusqu'il y a peu, un club de football était propriétaire de son joueur, quel que soit son statut sportif. Le fameux Arrêt Bosman permet maintenant au joueur professionnel en fin de contrat de quitter librement son club. Ce n'est que si le contrat court toujours que le club cédant peut demander une indemnité de transfert. Librement est un bien grand mot, car, se rendant compte de l'aubaine, des managers sans scrupules se ruèrent sur ces marchandises ignorantes et très rentables. C'est eux qui négocient les contrats, et vendent leurs esclaves à leur propre compte. Leur profession d'esclavagiste a même été reconnue par l'Union Belge de Football. Pour obtenir la licence, il suffit de verser une caution de 3.000.000 FB. Il reste également des filières clandestines qui n'ont rien à envier aux négriers du bâtiment.

Exploitation des jeunes

Il existe, dans la région de Biévène, une organisation qui accueille des joueurs brésiliens. Si la marchandise est valable, elle sera rentabilisée, dans le cas contraire, si la bête est bancale, elle sera livrée à elle-même dans la jungle des sans-papiers. Voici, pour être clair un cas précis : Alexandre Rinaldi Dasilva, né le 3 avril 1977 arrive en Belgique le 1 avril 1994. Il a donc 17 ans. Il signe une carte d'affiliation auprès de l'Union Belge de Football, en faveur du club de Ostiches, pour ensuite être dirigé vers le club de Biévène. Ses parrains subviennent à ses besoins alimentaires, et patientent, car il sembler s'avérer que le produit est bon. En juillet 1998, il prend le chemin du RC Tournai, club au statut semi-professionnel. L'investissement commence à être rentable. D'autant plus, que le joueur Rinaldi Alexandre, qui est connu de la Fédération de Football, n'est pas inscrit aux registres de la population. Officiellement, il n'existe pas, il sera donc rémunéré clandestinement, abandonnant une partie importante de ses émoluments à ses protecteurs. Le 1er juillet 1999, il rejoint les rangs d'un club plus ambitieux : le Royal Francs Borains, dont le Président d'Honneur n'est autre que le Ministre d'État Robert Urbain. Curieusement, il obtient, à la même date, un permis de travail délivré par la Région Wallonne. Ce permis est valable jusqu'au 30 juin 2000. Toutefois, il continuera à être payé de manière clandestine. Il est maintenant la propriété d'un manager véreux, Kazimierz Jagiello qui habite à Uccle. La marchandise a bien évolué, il ne reste qu'à la terminer en la faisant apparaître au grand jour. L'entourage du joueur profitera du projet de régularisation des sans-papiers pour lui faire introduire une demande auprès de l'Administration communale de Saint-Ghislain à la fin du mois de janvier 2000. Parions que, bien qu'il ne réunisse aucune des conditions exigées (demande d'asile antérieure à 4 ans, retour impossible pour raisons politiques, problème de santé, attaches sociales et circonstances humanitaires), il verra, et j'en suis fort heureux pour lui (en tant qu'individu), sa demande acceptée. Bien que vieillissant, le Ministre Urbain a gardé une influence certaine auprès du pouvoir...

Prébendes et privilèges

Le monde du football belge a ses entrées dans le monde politique, comme dans l'administration, et bénéficie souvent d'une mansuétude dont d'autres secteurs économiques ne jouissent pas. En cette période où l'on déplore de plus en plus de faillites frauduleuses ou pas, qui privent des travailleurs et leurs familles de leurs ressources, on constate que 10 clubs de division 1 sont endettés auprès de l'ONSS, leur dette globale est de 85.000.000 FB. 14 clubs de la division deux sont dans le même cas pour un montant de 140.000.000 FB.

On peut d'ailleurs se demander comment ces associations ont pu arriver à une telle situation, étant donné le statut préférentiel dont bénéficie l'employeur d'un sportif rémunéré. La loi du 24 février 1978, relative au contrat de travail du sportif rémunéré, dont l'article 3, ?1er, a été remplacé par la loi du 4 juillet 1989, et modifié par la loi du 4 août 1996 prévoit que les revenus d'un sportif rémunéré ne sont soumis à la taxation à l'ONSS, que jusqu'à un montant annuel de 551.951 FB, montant qui vient d'être actualisé par l'Arrêté royal du 14 décembre 1999. Ce qui représente un plafond mensuel de 45.996 FB. Quand on connaît les salaires indécents qui sont payés aux vedettes sportives, cette disposition légale est une véritable insulte aux travailleurs. Un joueur de football moyen de division 1 bénéficie d'un salaire mensuel de 500.000 FB.

Cette loi a bien entendu été approuvée sans qu'aucune publicité ne lui soit accordée. Elle est inconnue de tous les citoyens.

Inégalités chiffrées

Pour en mesurer l'impact, voici les taux des cotisations patronales et personnelles en vigueur au deuxième trimestre 1999. Travailleur manuel : Quote-part personnelle 13,07 % - Quote-part patronale 40,13 %. Travailleur intellectuel : Quote-part personnelle 13,07 % - Quote-part patronale- 34,13 %. Sur un salaire mensuel de 500.000 FB cela fait un cadeau de 241.530 FB !

Le pouvoir sera toujours très indulgent avec ses fidèles serviteurs.

Au lieu de crier au loup en direction du cadavre du répugnant Pinochet (il était plus difficile de le faire 20 ans plus tôt), ou du trop séduisant Haider, Élio Di Rupo et Louis Michel devraient faire preuve de plus de transparence dans leurs agissements.

Laisser le peuple dans l'ignorance, afin de mieux le diriger, c'est ce que les politiciens de tout bord font, et c'est ce que je m'efforce de dénoncer en ces colonnes.

À la complicité du pouvoir, répliquons par la dénonciation des pratiques utilisées par les hommes pour lesquels arriver, et rester au pouvoir est le seul but dans la vie? à n'importe quel prix.

Cerise


 

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