anarchisme - portrait anarchiste
- May Picqueray
- May, la réfractaire
Editions Los Solidarios
- Si, après soixante années de luttes, May Picqueray accepte aujourd'hui d'être surnommée La réfractaire, c'est qu'elle ne cache pas sa fierté d'avoir été présente à tous les rendez-vous de l'histoire de 1920 à ce jour.
De l'affaire Sacco et Vanzetti, qu'elle réussit à porter à la une des journaux en 1921 en envoyant un colis piégé à l'Ambassadeur des Etats-Unis à l'entrevue orageuse avec Troski au Kremlin en 1922, ses innombrables combats, témoignent de sa détermination farouche de faire passer la vérité au dessus des mensonges.
Le récit lucide et attachant qu'elle fait de ce véritable corps à corps avec l'évènement montre combien il est erroné de voir dans l'anarchisme une impasse et dans l'action individuelle une méprise ou une désespérance.
May Picqueray
May, la réfractaire
222 pages - 13 €
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May Picqueray (Marie-Jeanne dite May)
Née le 8 juillet 1898 à Savenay (Loire-Inférieure), morte le 3 novembre 1983 à Paris. Militante anarchiste.Marie-Jeanne Picqueray passa son enfance avec ses frères et sa soeur en Bretagne et fréquenta une école privée que dirigeaient des soeurs. Son père était convoyeur postal ; sa mère, couturière en chambre, qui avait failli mourir en la mettant au monde, la détestait et l'éleva très durement.
L'enfant travaillait assidûment à l'école et fut reçue à dix ans et demi au Certificat d'études avec mention Très bien.
Placée chez un négociant à Penhoët, elle y resta peu et fut engagée par une institutrice pour s'occuper d'un de ses deux fils épileptique. Considérée comme l'enfant de la maison, Marie-Jeanne partit avec ses employeurs et leurs deux fils pour le Canada. Deux ans plus tard, le petit épileptique mourut et Marie-Jeanne fréquenta alors le lycée de Montréal. Mais ce fut la guerre. Son " maître " regagna la France et fut tué, sa femme mourut et un oncle recueillit le fils restant. Quant à May Picqueray, elle fut rapatriée.
Elle travailla alors comme interprète puis dactylo bilingue. Mariée une première fois, elle quitta son mari qui se droguait.
Venue à Paris en 1918, elle se lia à Dragui, étudiant en médecine qui l'initia aux doctrines anarchistes auxquelles elle adhéra. Elle participa aux sorties champêtres collectives que pratiquaient volontiers les compagnons, elle connut Sébastien Faure, Lecoin... Mais Dragui partit pour l'Allemagne, son frère aîné s'opposant à ses fréquentations.
Inscrite au groupe des Jeunesses anarchistes des Ve et XIIIe arr. et aux Jeunesses syndicalistes, May Picqueray devint en 1922 secrétaire administrative de la Fédération des Métaux. Elle assista au premier congrès de la CGTU, tenu à Saint-Étienne en juin-juillet 1922, et fut déléguée pour accompagner Louis Chevalier, secrétaire fédéral, au IIe congrès de l'Internationale syndicale rouge à Moscou en novembre 1922.
Elle profita de son séjour pour demander une entrevue à Trotsky au cours de laquelle elle obtint la libération de deux jeunes anarchistes russo-américains, Mollie Steiner et Sonya Flechine, condamnés à la déportation aux îles Solovietsky.
Bloquée à Moscou par défaut de passeport, elle put revenir grâce à de faux papiers remis par les autorités russes ; arrêtée à la frontière franco-belge, elle fut écrouée à Avesnes-sur-Helpe et condamnée pour usage de faux.
Quelques mois après son retour, la Fédération des Métaux étant passée sous influence communiste, May Picqueray la quitta et partit pour la province où, mi-rédactrice, mi-correctrice, elle travailla pendant sept ans dans un journal régional. Elle fut également, pendant trois ans (jusqu'en juillet 1926), la secrétaire particulière d'Emma Goldman qui résidait alors à Saint-Tropez.
Elle revint à Paris pendant la guerre d'Espagne et travailla pour diverses oeuvres de bienfaisance. C'est ainsi qu'elle collabora, pour le compte de Quakers américains, à l'évacuation des enfants espagnols.
A partir de juin 1940, à Toulouse, toujours pour le compte de Quakers, elle s'occupa des camps de concentration français de la zone libre, en particulier des camps de Noé et du Vernet. Elle favorisa alors plusieurs évasions, puis se sentant suspectée, elle dut quitter la région. Elle n'en continua pas moins, de manière indépendante, à fabriquer de faux papiers pour des évadés ou des résistants de divers groupements.
May Picqueray devint ensuite correctrice dans une maison de labeur à Paris, puis dans un journal local en province et enfin adhéra le 1er octobre 1945 au syndicat des correcteurs de Paris lors de son entrée dans la presse parisienne. Elle fut l'une des quatre ou cinq femmes, toutes militantes, que comptait alors le syndicat des correcteurs.
A la disparition de Libre Soir Express, journal qui l'employait, May Picqueray et l'une de ses camarades décidèrent de citer la direction du journal devant les autorités prud'homales, ce qui ne s'était jamais fait, afin d'obtenir un mois d'indemnité de licenciement. A l'étonnement général, satisfaction leur fut donnée et le jugement fit jurisprudence.
May Picqueray fonda les Amis de Louis Lecoin pour continuer sa propagande et apporter une aide pratique aux insoumis, réfractaires et autres objecteurs de conscience. Elle fit paraître le mensuel des Amis, Le Réfractaire (premier numéro le 1er avril 1974) jusqu'à son décès en 1983.
Jean Maitron
© Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français - Editions de l'Atelier - 1997.